Marco l’artiste… et pas que

 

Experiencias a través del autismo

de Antonella Tofano

Amici della Fondazione  Martin Egge Onlus

 

En ce texte, je ferai un récit sur ma rencontre avec la Dr. Chiara Mangiarotti, sur le parcours initié à travers l’atelier de peinture avec mon fils Marco, et sur les expériences positives qui mon apporté les bons conseils éducatifs que l’on m’a donné.

Mon fis a maintenant 25 ans, et nous reçûmes le diagnostic d’autisme lorsqu’il n’avait que trois ans. Il ne fut jamais facile de l’éduquer parce qu’il avait un fort caractère, souvent oppositif que, additionné à un physique imposant (il mesure actuellement 1m95 pour un poids de 100 kg) et une certaine tendance aux comportements agressifs, cela nous a souvent amené à ne pas l’inscrire aux activités scolaires, ou à limiter l’intervention éducative par la peur de l’agression physique. Malgré qu’il possède un niveau cognitif qui lui a permis d’apprendre à lire et à écrire, Marco ne verbalise pas –par exemple, il s’exprime avec des holophrases-, mais en général il a un bon niveau d’autonomie personnelle. Depuis tout petit il a montré le goût pour le dessin, et au fur et à mesure il a développé son talent et son style expressif, ce que nous avons encouragé en l’inscrivant à un licée artistique pour y réaliser ses études secondaires.

Les problèmes, donc, ont toujours été nombreux, mais à travers la structuration spatio-temporelle, avec l’aide de la communication à travers d’images et de pictogrammes, utilisées également pour dicter les règles de conduite, nous avons réussi à ce que Marco soit une personne capable d’assister à l’école, et ensuite, au centre de jour.

Fin 2015, une période de profonde crise a débuté. En même temps que la sortie de la maison de son grand frère pour un programme Erasmus, et la maladie de ma mère qui m’a obligé à m’absenter de la maison durant des longues heures pour prendre soin d’elle, Marco a commencé à se renfermer progressivement et à manifester du refus envers tout et envers tous. Il ne sortait plus de la maison, il enleva du mur le calendrier avec l’organisation de ses journées, il ne répondait plus devant aucune règle, il ne se lavait plus, et lorsque l’anxiété dépassait un certain seuil, il détruisait la maison à coup de poings. Nous avons cru qu’il était tombé dans une sorte de dépression et nous ne savions plus quoi faire. Nos personnes de référence habituelles ne semblaient pas non plus pouvoir nous aider, à cause du refus net avec lequel Marco s’y opposait.

Cependant, il arrive parfois qu’au beau milieu de la crise que la vie te présente, lorsque tu sens que tu es arrivée à la limite de l’humainement supportable, arrive une aide inespérée. Et ce fut ainsi. Une ex professeur de dessin du Licée artistique auquel Marco avait été, connaissant son talent artistique, il nous a contactés pour nous proposer que Marco participe à une exposition de peinture, et nous avons accepté. C’est ainsi que j’ai rencontré la Fondation Martin Egge Onlus et la Dr. Chiara Mangiarotti, qui étaient les promoteurs de l’initiative qui a eu lieu à Venise, à 70 km d’où nous habitons. Je savais que la fondation utilisait une approche différente à celle que nous avions adoptée jusque-là, mais suivant l’emblème « on ne peut rien réussir de nouveau en faisant toujours la même chose », j’ai décidé de tester, d’entendre ce que cette gentille docteur avait à me dire.

D’abord, on m’a conseillé d’aider Marco à s’apaiser, ne lui faisant pas des demandes de façon directe, mais en triangulant avec une autre personne pour lui faire arriver le message ; suivre ses inclinaisons et préférences, me positionnant comme un guide attentif mais discret et jamais en forme d’imposition. J’ai appliqué ce même soir ces indications et, avec mon mari, j’ai commencé un dialogue pour inviter Marco à prendre sa douche. J’ai dit à mon mari avec une certaine emphase : « Diego, est-ce que tu t’es lavé aujourd’hui ? Je sens une odeur dans cette chambre… » La réponse de mon mari fut « Mais bien-sûr que je me suis lavé, et j’ai même mis du déodorant ! Alors ça doit être toi… » Le dialogue entre nous deux a continué comme ça, en nous faisant des remarques mutuelles sur l’existence des règles universelles pour tout un chacun, et se laver en faisait partie. Marco, qui savait très bien qu’il ne l’avait pas fait, après quelques minutes, il s’est levé pour aller prendre une douche ! Nous avons été très contents et surpris par ce premier résultat, mais surtout parce que nous avons pu interagir avec lui après des mois de fermeture totale et de refus, spécialement envers moi.

Ce premier épisode a été suivi par d’autres, et de cette façon cette modalité est devenue habituelle pour nous, incluant aussi son frère ou d’autres figures de référence. Une fois, nous étions à la maison avec la psychologue de notre district, à qui j’avais invité à boire un café, et il a commencé à m’agresser verbalement comme réponse à la simple question « veux-tu manger quelque chose ? » Je me suis retourné vers la psychologue, et j’ai dit : « Marta, penses-tu que pour dire que tu ne veux pas manger il faille lever ainsi la voix et agresser les gens ? Car, tu sais, je m’effraie très vite… » Elle m’a répondu « non, et en effet, ça serait mieux de dire tranquillement, je ne veux pas manger, merci. Les gens le font comme ça, il s’agit d‘une règle sociale. » Persuadée que ces thèmes étaient en dehors des possibilités de compréhension de Marco, puis que cela impliquait des aspects émotionnels et sociaux, elle ne pensait pas qu’il fut capable de les comprendre. Cependant, plus tard elle s’est rétractée et m’a présenté ses excuses.

Une autre belle expérience a été l’atelier de peinture, organisé par la Fondation dans un studio d’un artiste peintre vénitien. Egalement, à travers la triangulation entre l’opérateur de la fondation Nicola Aloisi, et l’artiste, Marco fut encouragé à exprimer son talent en peignant des thèmes différents à ceux qu’il reproduisait habituellement. C’est-à-dire, différents aux visages aux expressions intenses et fortes couleurs, qu’il détruisait souvent avec grande violence après les avoir créés. Au-delà de l’aspect artistique de ces œuvres, qui ont été exposées dans l’exposition, il était évident que pour Marco cela signifiait quelque chose de très important, mais en même temps, conflictuel. C’était un personnage récurrent habillé en violet et rouge, avec une coiffure très spéciale et élaborée. Les expressions des variations du même personnage étaient toujours très intenses : parfois attirants et sympathiques, mais souvent ils étaient sévères, avec des grands yeux menaçants. D’autres fois il dessinait des crânes et des squelettes, avec des cheveux raides, comme un punk. Un jour il a décidé de tous les casser : il a sorti les dessins des fardes où il les gardait et les a jetés à la poubelle, dans le bac pour le tri des poubelles. Il a aussi effacé les copies de chaque support média digital et n’a voulu les regarder plus jamais.

Durant l’atelier, à ce moment-là, on lui propose d’autres thèmes qui puissent le distraire de ces images perturbatrices, mais qui devaient être librement choisis par lui. L’élection revint sur le paysage de son endroit préféré, un petit bosquet qui s’ouvre sur une colline qui domine le paysage sous-jacent. Marco passait, et il passe toujours, des heures à cet endroit, admirant le paysage et surement bénéficiant d’autant de calme et de beauté. Le rendez-vous quotidien avec le bosquet était inévitable, tellement que cela pouvait l’empêcher de se rendre à l’atelier, car les heures de marche et le rendez-vous sur Venise se superposaient. Donc, à nouveau, il a été décidé de suivre ses priorités et de reprendre le laboratoire en septembre, mais au centre de jour auquel il se rend actuellement.

Malgré ces succès, le problème de communication avec lui s’est présenté ponctuellement à nouveau, avec des gros pics de frustration. C’est comme ça que Dr. Mangiarotti m’a parlé du livre et le film Life animated, qui raconte l’histoire d’un père qui parlait avec son fils avec autisme à travers la voix de différents personnages de dessins animés, les mêmes que Marco aimait. Au début je n’étais pas très convaincue, mais un jour, alors que Marco était sur le point de faire une crise de comportement qu’en général finissait avec un poing contre un mur ou une porte, les cassant, j’ai pris deux bonshommes que j’avais préparés et j’ai improvisé un dialogue entre eux, comme un théâtre de marionnettes : « eh ! toi ! T’as besoin de faire un trou dans le mur ? » « Non, non, pas moi ! et si jamais j’en avais besoin, j’appellerais un maçon professionnel ! » Marco fut si surpris qu’il a pu passer outre le moment de crise par lui-même, et se détendre. Pour ne pas attribuer ce succès au hasard, j’ai répété cette modalité en d’autres situations critiques et toujours avec du succès. En effet, un jour on aurait dit qu’il imitait la Bête –du dessin animé « La Belle et la Bête »- car il criait fort et il était évident que bientôt il déchargerait la rage contre quelque chose ou quelqu’un. Alors j’ai improvisé une interprétation de Belle, impuissante, effrayée, et je lui ai demandé d’arrêter de crier et de se calmer. Non sans effort, Marco a arrêté de crier, il s’est calmé, et est venu me serrer dans les bras et me tranquilliser.

Ayant vu l’effectivité de ce mode interactif, j’ai décidé d’inclure mon époux et mon fils. Un jour où nous étions à table tous ensemble, j’ai commencé à parler à mon mari et à mon fils sur cet enfant américain qui aimait bien les dessins animés de Disney, et de son père, qui avait commencé à interagir avec lui en utilisant la voix de ces personnages. Marco –que par ces temps-là regardait toujours un épisode particulier de Bugs Bunny, produit par la Warner Bros, est intervenu dans la conversation et a dit : « Pas de Disney ! Warner Bros oui ! », confirmant ainsi encore une fois que de lui parler de façon indirecte lui permet de comprendre mieux et de s’exprimer avec plus d’aisance.

Le dessin animé de la Warner Bros que Marco regardait toujours était un épisode intitulé « le toréro », dans lequel le lapin Bugs Bunny vainquait grâce à la ruse un puissant taureau noir. Une scène l’interpellait particulièrement : Celle dans laquelle le toréro, terrifié par l’agressivité du taureau qui venait à sa rencontre, abandonne la cape qu’il a en main et s’enfuit en courant, poursuivi par le taureau. A un certain moment de cette scène, pendant que le toréro est encore en train de fuir, le lapin Bugs Bunny émerge du sol de l’arène car, en faisant une erreur pendant qu’il creusait un tunnel, il s’était trompé de chemin. Alors le taureau attaque le lapin, provoquant sa réaction ; mais le lapin ne réagit pas en utilisant sa force, mais la ruse, ce qui fera que le plus faible triomphe sur le plus fort. Ces scènes furent l’objet de conversations entre la Dr. Mangiarotti et moi-même, pour essayer de comprendre la valeur qu’avaient pour Marco, puis que c’était évident qu’il en était fortement impressionné, il ressentait le besoin de dessiner le toréro, de casser le dessin et de recommencer moultes fois, activant en lui des sentiments d’anxiété. Je me rappelle qu’elle m’avait conseillé de mettre « en pénitence » le taureau qui poursuivait le lapin, en lançant les dessins que Marco faisait dans une boîte fermée, pour qu’il puisse entendre que le persécuteur était là enfermé et qu’i ne pouvait plus nuire. En plus, le fait de valoriser le comportement intelligent du lapin qui réussissait que les choses aillent mieux en utilisant l’intelligence. Parfois, une fois que Marco avait jeté le dessin, j’ai fait le test de gronder le taureau, mais il se fâchait, il ne voulait pas que je le fasse. Alors, j’ai préparé une boîte à l’emplacement du tri des poubelles, et dès que j’ai vu que Marco allait lancer un de ses dessins à la poubelle, je lui ai montré, sans parler, la boîte ; après qu’il y ait mis le dessin, j’ai remis le couvercle et en pointant du doigt la boîte je dis « Et tu restes là ! » Cela l’a aidé, tellement que spontanément il a commencé à jeter les dessins là, et peu après je ne les ai plus revus.

Pour conclure, je sens que depuis que j’adopte une approche moins directive avec mon fils, plus dirigée à répondre à ses besoins d’être guidé sans le faire sentir impuissant, mais me présentant à lui comme manquante, il me répond mieux et les conduites agressives ont diminués beaucoup en sa fréquence et son intensité. En plus, j’ai l’impression d’être plus proche de lui et à un niveau plus profond que par le passé. Lorsque je parle avec lui, j’attends une réponse que parfois vient, parfois pas, mais peu importe. Je sens qu’il est là.

Traduction: Itxaso Muro Usobiaga