Réflexions

José Antonio Marín

TEAdir-Aragón


Il y a deux garçons et une fille. Ils courent dans le salon, montent sur le sofa, sautent. « Nous sommes des pirates ! » crient-ils. Tout à coup, l’ainé, Miguel, s’arrête. « Papa est arrivé ! Il est là !  Ecoutez les enfants ! Il est là ! » ; dit-il. Il vient me serrer dans ses bras, et son accolade me comble. C’est un seconde de joie si intense… Les plus petits se joignent à nous. « Papi ! Papi ! » En un rien, ils sont bruyants, envahissent tout, m’accaparent, m’embrassent, veulent tout me raconter… Par un coin de l’oeil, je vois Miguel s’en aller, retourner à son monde intérieur. Il chantonne une des nombreuses chansons qu’il a appris par cœur. Au fond le téléviseur sur le canal Tele-tienda se fait entendre aussi : « Il y a encore plus ! Si vous n’est pas satisfait, nous vous remboursons votre argent ! ». Miguel s’en saisit et répété cette slogan avec la même intonation, avec les mêmes mots en esquissant un petit sourire au visage.

En réalité, nous croyons tous savoir. Savoir ce que nous sommes, comment sommes-nous faits, qui sommes-nous… Mais, et nos enfants ?

Comment s’entendent-t-ils la lune et le soleil ? Quels sont leurs critères, leurs prémisses, leurs principes, leurs normes à eux ? De quoi parlent-ils ? De quoi ont-ils peur ? Pour quoi choisissent-ils de continuer à tourner en rond au lieu de chercher à prendre le chemin tout droit ?

Il y a quelques jours, j’ai entendu la scientifique Sonia Fernandez-Vidal, originaire de Barcelona, agrée de physique quantique, qui a travaillé dans l’accélérateur de particules du Conseil Européen pour l’investigation nucléaire, expliquer la théorie qu’ils existent différentes réalités. Une systole-diastole faite de multiples dimensions. C’est là que j’ai mieux compris mon fils. Je savais déjà que son univers n’était pas exactement pareil que le mien, si prosaïque, si normalisé, si rationnel. À ce moment les pièces du puzzle me sont devenues plus compréhensibles : notre cerveau peut penser aussi – et il le fait- avec une logique quantique : la fantaisie, l’illusion, l’imagination, les rêves, sont aussi des fonctions neuronales qui nous appartiennent. Et elles ne sont pas régies par le raisonnement.

Il s’avère que nous sommes seulement des particules élémentaires : des subatomiques, quarks et électrons, qui ensuite forment les protons, et composent à la fois les atomes qui conforment à leur tour les molécules. Et ces particules subatomiques défient la logique de la physique classique, de telle manière que celle-ci ne peux plus affirmer que « la réalité c’est une vérité objective ». Nous devons dire maintenant : « la réalité n’est pas une vérité fixe et objective. À l’observer, elle est volubile et mouvante. »

C’est pour cela que les émotions que nous ressentons, l’angoisse ou la joie, le plaisir et la douleur, ne peuvent pas être quantifiables : car elles sont et ne le sont pas. Tout comme Miguel. C’est pour cela que les sciences classiques qu’étudient la réalité pour lui donner une explication mécanique et déterminée, ne peuvent pas répondre à la CONSCIENCE. À la merveille de la contradiction, qui coexiste entre nous et qui réponds à une autre logique… peut-être pas rational.

Je suis sûr maintenant que mon fils possède un monde riche qui lui est propre. Beaucoup plus vaste que le mien. Beaucoup plus attractif et qui comme les quarks, il peut être là et pas là à la fois. Si les particules élémentaires ignorent l’espace-temps, pour quoi Miguel, ne pourrait-il pas le faire aussi, lui qui est un miracle beaucoup plus grande qu’une simple particule ?

Il m’a fallu assumer que probablement je ne pourrais pas jouer avec lui comme les autres pères avec leurs enfants. Accepter que pour nous, il allait s’agir d’un jeu très, très spécial. Un jeu dans lequel les réglés sont dictés par Miguel. Il a fallu assumer tant de choses…

C’est inévitable. Tu le remarques chez les autres. Et la rage te dévore à l’intérieur. Tu n’as pas envie que l’on ait pitié de toi. Qu’ils pensent : « Ah le pauvre ! » Et malgré cela, dans un moment ou un autre, tu chutes. Même si tu le vois avancer, s’efforcer plus qu’un autre, être constant jusqu’à qu’il réussit à découvrir ce qu’une chose signifie ou le fonctionnement d’autre chose qui lui échappe. Quelquefois tu oublies de lui donner une valeur à cela. A la place, une idée noire traversé ta pensée. Et c’est à ce moment que Miguel, qui te semblait si lointain, absent, tandis que les autres sont vraiment absorbés par leurs occupations, il te regarde et lâche un : « Qu’est qui t’arrive papa ? Pour quoi tu es si triste ? Ne t’inquiètes pas, je vais t’aider.»

Et c’est alors que tu ressens la rage parce qu’il t’a surpris, parce qu’encore une fois tu n’as pas eu confiance en lui. Et que tu ressens aussi une énorme tendresse à son égard et tu as l’impression d’être le plus fortuné des pères dans le monde pour avoir un fils si spécial.

Miguel aime la chanson « Libre » du chanteur Jarabe de Palo. Nous l’avons découvert par hasard, comme il nous arrive avec presque tout ce qui le concerne. Dans un CD de compilations, cette chanson apparaissait à la première place. Il s’est mis à l’écouter. Et à partir de ce moment il n’a pas arrêté de vouloir l’entendre une et autre fois. Aujourd’hui, trois ans après cet épisode, s’il l’écoute de nouveau, il la reçoit toujours avec la même émotion.

« Laisse-moi vivre

Libre

Comme les colombes

Qu’ont fait leur nid sous ma fenêtre

Ma compagnie

À chaque fois que tu t’en vas.

Laisse-moi vivre

Libre

Libre comme l’air.

Tu m’as pris à voler

Et maintenant

Tu me coupes les ailes.

Et être de nouveau moi-même

Et que toi, tu sois de nouveau toi,

Libre

Libre comme l’air.

Laisse-moi vivre

Libre

A ma façon.

Et de nouveau respirer

De cet air

Que me fait revenir à la vie

Mais à ma manière.

Interview à Sonia Sanchez-Vidal, réalisée par Julia Otero (2011)

Qu’est un quark ? Et un électron ?

Ce sont les particules les plus élémentaires de la matière : le nucléon de l’atome est fait de protons, et les protons sont faits des quarks.

Et les quarks ?

Ce sont des particules vibrantes. Il y a de différents types, quelques-unes plus rares. Les deux plus communs sont : Up et Down.

Et les électrons ?

Ce sont des particules que sont corpuscule et onde. Orbitant tout autour du nucléon. Si le nucléon de l’atome était une bille dans le centre d’un stade de football, l’électron serait alors la tête d’une épingle tournant autour des gradins !

Oh ! Quelles distances !

Oui, en effet l’atome est presque vide. La matière est une sorte de vide, une tension d’énergie.

Alors, la matière est presque une illusion…

Et les propriétés des particules subatomiques mettent au défi la logique de la physique classique.

Quelles sont celles propriétés ?

Une particule peut-être ici et là-bas à la fois ! Les particules sont toutes… partout en même temps. Entremêlées avec le tout. Une particule peut se téléporter : sa structure peut instantanément devenir une autre. Comment être vivant et mort à la fois.

Pardon ?

Oui, les particules élémentaires ignorent l’espace-temps.

Cela represente un défi à l’entendement, à la logique rationnelle…

Mais notre cerveau peut aussi penser avec de la logique quantique : la fantaisie, l’imagination, l’intuition, les rêves, la magie… Ce sont aussi nos fonctions neuronales!

La physique quantique pourra expliquer un jour des phénomènes extrasensorielles, la télépathie par exemple ?

Elle inspirera des voies de compréhension, pourra proposer quelques explications à partir de la logique non mécaniciste. Entre temps, la science étudie déjà la neurologie des émotions, comment se transmets l’information cérébrale…

Et?

Les micro-tubules neuronales et leur complexe maille entremêlée, peuvent être des mécanismes quantiques dans notre cerveau. Ton cerveau une machine quantique ! Peut-être que sans le savoir, nous portons sur nos épaules un ordinateur quantique.

Sommes-nous devant un saut scientifique ?

Nous sommes devant un changement de paradigme. La physique classique analysait la réalité comme si c’était quelque chose d’externe et objectif, cherchant une explication mécaniciste et déterministe.

Comment la physique quantique conçoit elle la réalité ?

Comment un continuum duquel notre conscience n’est pas séparée ! Ainsi à partir du moment où tu te mets à observer cette réalité subatomique, tu es déjà en train de la modifier !

Comment cela ?

La conscience de l’observateur interfère dans le comportement des particules élémentaires, qui réagissent à l’observation. Ainsi, si tu t’attends à qu’une particule subatomique agisse comme une onde, alors elle le fait ! Et si tu t’attends qu’elle le fasse comme un corpuscule, elle le fait aussi !

Conclusion ?

La science ne peut plus affirmer : « la réalité est une vérité objective ». Aujourd’hui elle se doit dire: « La réalité n’est pas une vérité fixe, objectivant. A l’observer, elle est plutôt volubile, mouvante. »

Quelles sont les implications de cela ?

Il nous faudra accepter que la logique rationnelle ne va pas pouvoir tout expliquer. Il nous faudra admettre le merveilleux de la contradiction, qui réponds à une autre logique.

Être scientifique et physicienne quantique affecte votre manière d’être ?

Oui. Dans trois aspects : Le premier m’induit à penser d’une manière plus créative, latérale. Deux, cela me pousse à agir sans victimisation, à construire ma réalité. Et trois, cela m’aide à sentir que nous sommes tous liées.

Comprendrons-nous mieux le fonctionnement de l’univers à l’aide de tout ceci ?

C’est ce que les artistes, les mystiques et les scientifiques anhélons. Nous anhélons la même chose, et en cela chaque jour, nous nous ressemblons un peu plus.

 Traduction : Mariana Alba de Luna